On ne présente plus Third Editions, éditeurs dont nous avons parlé à plusieurs reprises pour évoquer leurs ouvrages sur différentes licences cultes du jeu vidéo. La maison d’édition toulousaine ponctue notre calendrier avec des sorties mensuelles, et à l’approche de la fin d’année 2023 c’est un nouvel ouvrage intitulé La Saga Final Fantasy VII Remake, dédié au jeu éponyme, qui nous était rendu disponible. Écrit par Pierre Lovati, ce livre nous a replongés dans la création et l’univers de cette saga mythique, et il est donc temps d’analyser cet ouvrage analytique pour vous en parler au mieux !
Pierre Lovati est auteur et vidéaste depuis 2016 avec une chaîne Youtube portée sur le jeu vidéo et proposant un regard différent sur notre médium favori, au sein de réflexions pertinentes et intéressantes telles que le rapport au temps consacré à un jeu, ou encore le rapport entre humain et bêtes sauvages dans les jeux. Un regard qu’il partage aussi dans la revue Immersion, une production semestrielle ambitieuse cherchant à traiter le jeu vidéo comme une forme artistique méritant une analyse fine, qui s’inscrit dans le temps. Il donne par ailleurs des cours sur le design narratif, ainsi que sur l’histoire et des jeux vidéo, à la Haute École Albert Jacquart, en Belgique.
Pour l’écriture de La Saga Final Fantasy VII Remake, Pierre s’est plongé dans le jeu pendant une année entière, ne jouant quasiment qu’à ce titre. En résulte un ouvrage de 332 pages remerciements inclus (remarque amusante, c’est presque dommage : on était à une page des 333, le 3 étant le chiffre phare de la maison d’édition) qui, s’il reprend les principes fondateurs de la maison d’édition à travers le crédo « Création, Univers, Décryptage », aborde le titre d’une nouvelle façon. En effet, après une petite introduction plutôt comaque, l’ouvrage s’articule autour de la narration, racontant les évènements chronologiques de Final Fantasy VII Remake, et y mêlant histoire du développement et analyse. Cette tournure permet de (re)découvrir le titre, car si l’on peut tout à fait le lire sans avoir joué à Final Fantasy VII Remake, il est bien sûr préférable d’avoir déjà parcouru la nouvelle mouture des aventures de Cloud et Séphiroth, voire le jeu originel sur PS1 (ou un de ses portages), pour mieux en comprendre et apprécier le parcours analytique qui nous est ici livré.
Car c’est le principal intérêt de cet ouvrage : analyser en profondeur chaque moment du parcours de Cloud, avec le plaisir de bénéficier, par le travail de Pierre, de la comparaison avec les évènements du Final Fantasy VII original, ce que l’on ne pouvait pas forcément faire en tant que joueur au moment de découvrir ce remake. Ce travail d’analyse permet aussi de donner à voir le jeu originel en tant que reflet du Japon et de son histoire, ce qui se transpose plus globalement via le Remake où cet aspect résonne toujours autant, si ce n’est plus encore, avec notre monde actuel, que ce soit concernant la cause écologique, la lutte sociale contre un pouvoir en place abusif, le rapport à la propagande et aux fake news…
Ce travail d’analyse se veut alors complémentaire au récit, et offre de nombreuses clés de lecture à Final Fantasy VII Remake, justifiant le changement de la fondation même de la collection Third Editions : alors qu’on avait par le passé pu plonger dans La Légende Final Fantasy VII, écrit par Mehdi El Kanafi et Nicolas Courcier, ici on découvre La Saga Final Fantasy VII Remake. Il s’agit d’un projet qui s’inscrit dans le temps long, avec un Remake qui prend tout son sens, ce qui devient limpide dans les dernières pages de ce livre avec un discours métaréférentiel dans la fin du jeu qui nous est ici explicité.
La maquette du livre lui fournit une identité graphique très agréable, avec des visuels épars qui donnent à voir Midgar et son univers.
Le propos de l’auteur est très sourcé tout au fil de l’œuvre, avec un gros travail de compilation d’anecdotes, d’interviews et de connaissances historiques. Le livre est aussi entrecoupé de portraits des personnages du jeu, revenant sur leur passé, leurs enjeux, et les thématiques qui se rapprochent d’eux, avec par exemple un zoom sur Cloud et le parallèle entre son immaturité émotionnelle et l’amnésie dont il souffre. De la même façon, des interludes viennent ponctuer le texte, reprenant des phrases du jeu et liés pour la plupart à des flashbacks et permettant de nourrir la réflexion en cours, ou d’en amorcer une nouvelle. On note par ailleurs que cet ouvrage ne comporte pas que du texte, avec notamment des photos libres de droit venant illustrer le propos, et une maquette graphique qui apporte un vrai plus à l’objet littéraire, en se mariant parfaitement à l’univers de Final Fantasy VII Remake.
La Saga Final Fantasy VII Remake est un titre captivant, dont il est difficile de décrocher pendant la quinzaine d’heures qu’il faut pour le parcourir (à descendre à une douzaine pour les plus rapides, car il faut tenir compte de la prise de notes de notre côté !). Sa lecture est agréable, surprenante même, et le seul reproche que l’on pourra trouver au livre sera son écriture parfois déconcertante : l’auteur possède un style rédactionnel bien à lui, et sa plume signe des tournures de phrases parfois inégales, avec tantôt des phrases courtes qui s’ajoutent aux précédentes, et tantôt des phrases plus longues où il faut parfois revenir pour ne pas perdre le fil de la réflexion proposée. Rien qui n’empêche néanmoins de profiter pleinement du livre et de son propos extrêmement intéressant, s’instaurant en pilier d’une saga analytique à venir au fil des sorties que constituent la trilogie Final Fantasy VII Re. Rendez-vous en février 2025 pour le deuxième livre ?
La Saga Final Fantasy VII Remake est disponible dans vos meilleures librairies, ainsi que sur le site de Third Editions, au prix de 29.90€ en édition classique, et à 34.90€ en édition First Print (incluant une couverture alternative exclusive, une jaquette réversible avec la couverture de l’édition classique, un ex-libris de Léopold Charniot, et le livre en version numérique). Un exemplaire de l’ouvrage nous a été envoyé par l’éditeur pour la rédaction de cette chronique.
Les portraits de personnages sont l’occasion de mieux s’attarder sur leurs enjeux.
