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Deus Ex : Human Revolution

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Les prothèses cybernétiques font chaque année des progrès spectaculaires. S'intégrant de manière toujours plus naturelle aux terminaisons nerveuses sectionnées, elles ne sont plus de simples outils mais évoluent progressivement vers quelque chose d'autre, un organe de substitution. A partir de quel moment cette prothèse cesse-t-elle d'être un objet pour devenir une partie de nous-même? Voilà quelle pourrait être une des introductions de Deus ex: Human Revolution. Troisième épisode de cette série culte, prequel aux événements des précédents opus, la nouvelle création du studio Square Enix débarque sur les consoles nouvelles générations avec son aventure rodée au millimètre près. Et une chose est sûre, les japonais ne sont pas venus pour faire de la figuration dans le line-up des grosses cylindrées de salon.



Du carbone modifié


Je ne pourrais malheureusement pas faire ici le lien entre cet épisode et le reste de la série, néophyte que je suis et je m'en excuse d'avance. Mais rien ne m'empêche de vous parler en détail du jeu que j'ai entre les mains. L'intrigue vous place dans un futur relativement proche dans lequel les augmentations cybernétiques se démocratisent et rendent possible des prouesses inimaginables. Ancien policier et travaillant désormais comme responsable de la sécurité pour Sarif Industries, un des leaders du marché de l'augmentation, Adam Jensen sera victime dès le prologue d'un attentat dans lequel il perdra sa femme et l'usage de ses bras. Sauvé par les implants et prothèses, on retrouve notre héros quelques mois plus tard, véritable publicité ambulante pour ce transhumanisme si décrié par des groupements d'activistes dénonçant les applications militaires d'une telle technologie. Et des applications militaires, on espère bien qu'elle en a car Jensen n'est pas revenu pour pointer tranquillement derrière son bureau. S'il est de retour au travail, c'est pour trouver les commanditaires de l'attaque qui lui a coûté la vie de sa femme. Le postulat de départ est posé, dans un monde futuriste cyber-punk où les influences se marient à la perfection. De Blade Runner, Deus ex tire ses éclairages et son architecture totalitaire, alors que la contestation entre pro et anti-augmentations nous rappellera le plus récent Clones, jusque dans un twist scénaristique que je vous laisserais découvrir par vous-même. On pourrait énumérer ainsi tous les éléments qui réveillent chez le lecteur de SF en nous les souvenirs d'aventures cyber-punk à la Richard Morgan, voire une obsession du contrôle de l'information qu'on pourrait rapprocher à Metal Gear Solid et à travers lui aux écrits d'Orwell. Les graphismes sont en deçà des standards actuels mais esthétiquement, le travail est net et sans bavures. Le travail sur la lumière et les éclairages notamment est digne d'être souligné. Les environnements ont des identités fortes et si l'on pourra noter une forte redondance des couloirs aseptisés du fait qu'une grande partie de l'aventure prenne place dans des locaux sécurisés et fermés, on ne pourra nier que chaque type d'environnement dégage une atmosphère propre, jusqu'à la boite de nuit qui, sans débauches, présente un rendu tout à fait crédible. Mention spéciale à Hengsha où le passage de la Ville-Basse à la Ville-Haute s'accompagnera d'un changement total de lumière et de gamme chromatique. Les dialogues sont tous intégralement doublés en français avec un travail de voice acting de qualité, même pour les PNJ déambulant sans but dans la rue. Fait à noter, surtout pour Adam Jensen qui associe à sa classe incomparable (un manteau long, un bouc, une coiffure hérissée et des lunettes de soleil ça vous pose un homme) une voix un rien rauque de toute beauté. Sur le plan de l'intrigue à proprement parlé, elle est bien menée malgré quelques incohérences ou longueur. Elle ne révolutionne rien et on pourra la placer dans la continuité d'un Metal Gear Solid par exemple mais il faut avouer qu'elle est savamment orchestrée. Point non négligeable, là où MGS vous plaçait comme spectateur de la décision finale, ici, c'est à vous de faire ce difficile choix moral. Je ne vous en révèle pas plus mais il est vrai que ce dilemme m'a laissé indécis pendant une bonne demi-heure avant que je ne me décide, alors même que cela n'a pour seule incidence que la cinématique de fin. Lorsque le jeu vidéo touche à la morale philosophique, c'est toujours émouvant.



Tentaculaires, sombres et baignées d'une lumière artificielle oppressante, Detroit et Hengsha sont clairement inspirées par Blade Runner



L'homme et sa sécurité doivent constituer la première préoccupation de toute aventure technologique


Penchons-nous maintenant sur le gameplay, qui est sans conteste un des atouts du jeu. FPS/RPG, infiltration, Deus Ex sait marier avec virtuosité la nervosité d'un half-life, et un système de couverture très Gears Of War avec une interface d'évolution plus rôliste qui a pour but à terme de faire de vous un véritable Predator. Concrètement, chacune de vos actions vous octroie des points d'expérience, que cela soit l'élimination d'un garde (avec des bonus si vous le laissez en vie ou si vous l'éliminez en un coup, etc...), la réussite d'un objectif (avec encore une fois des bonus si vous accomplissez l'objectif sans victimes, sans vous faire repérer ou autre) ou le piratage d'un système de sécurité. Ces points vous permettent d'atteindre des niveaux nommés "paliers de dynamisation". En réalité, vous n'aurez pas de notions de niveau à proprement parlé, la jauge d'expérience nécessite toujours le même nombre de points pour atteindre le palier suivant. A chaque palier, vous obtenez un kit de dynamisation (à noter que vous pourrez en acheter dans les cliniques Amplib pour une forte somme de crédits). Chaque kit de dynamisation vous octroie un point de dynamisation (vous me suivez jusque-là?), points que vous dépenserez pour améliorer votre personnage. Et ces améliorations sont loin d'être accessoires puisqu'elles définiront finalement votre façon d'approche. Si vous voulez la jouer bourrin, développer votre armure corporelle, votre absorption du recul et dynamiser votre inventaire pour qu'il accueille les encombrants fusil lourd (avec un système d'inventaire découpé en carrés comme dans un beat'em all). Si vous préférez l'infiltration, développez vos yeux pour voir à travers les murs, votre radar pour connaître la position des gardes et leur champ de vision, vos pieds pour courir sans bruits et votre système de camouflage pour devenir temporairement invisible. Pour ma part je m'étais créé une configuration snipper à base de saut amélioré, de bras renforcés pour casser les murs et de piratage pour accéder à des zones surélevées inaccessibles autrement. Seul bémol, la majorité des missions se déroulent en environnements fermés plutôt restreints en terme de déplacement si bien que ma configuration snipper était totalement inutile et que j'ai du dépenser une fortune en kit de dynamisation pour me reconvertir en homme invisible. Globalement, toutes les approches sont possibles, les bourrins pourront s'en donner à cœur joie avec les différentes armes lourdes et les ennemis relativement nombreux. Leur nombre compense en partie leur manque d'intelligence mais cela ne suffira pas forcément. En début de partie, vos ennemis restent planqués à la même position et vous n'avez qu'à aligner les headshot depuis votre couverture en soufflant un peu entre chaque tir pour régénérer votre santé (comme c'est de plus en plus à la mode dans les jeux modernes).

A noter cependant que la santé ne se régénère pas aussi vite que dans un COD par exemple et que vous pourrez récupérer des analgésiques pour récupérer plus vite de vos blessures. Un système bâtard entre modernisme et retro qui ne convaincra pas forcément. En fin de partie par contre, les ennemis n'hésiteront pas à vous envoyer des grenades ou à vous contourner. Mais finalement, leur intelligence artificielle défaillante les conduira à se jeter les uns après les autres dans votre viseur voire, comme ce fut le cas pour moi, à tuer leurs propres alliés avec une grenade mal placée. Une tare qui pourra faire grincer des dents les plus exigeants mais remarquez que peu de jeux peuvent se targuer d'avoir une IA un tant soit peu potable. En furtif aussi c'est beaucoup trop simple. Une fois votre camouflage amélioré au maximum et la capacité de vos batteries dynamisées, vous pourrez rester invisible 30 secondes d'affilé, vous permettant de rusher les niveaux sans que les ennemis ne vous remarquent, se contentant de lancer un "qu'est-ce que c'est?" à votre passage. Dès que vous aurez mis la main sur suffisamment d'argent pour vous acheter suffisamment de recharges pour vos batteries, vous terminerez les missions les unes après les autres à une vitesse affolante sans jamais toucher le moindre ennemi, même en mode de difficulté Deus Ex.
Une simplicité qui pourra être rédhibitoire pour certains joueurs. Autre point faible, les boss. Dans un jeu qui vous donne le choix entre une approche furtive et une approche bourrine, le principe de vous obliger à affronter frontalement un ennemi abusé ne semble pas justifié. Pour quelqu'un qui aura choisi une approche bourrine, ces combats sont beaucoup trop simples puisque les ennemis seront abattus en quelques balles de fusil lourd. Pour les furtifs par contre, ces combats relèvent de l'impossible avec des ennemis qui vous one-shot presque, invisibles, ultra-rapides, ultra-armés et qui vous demanderont de leur vider une centaine de chargeurs dans la tête avant de périr. Heureusement, comme si les développeurs s'étaient rendus compte que les boss n'étaient pas le point fort du jeu, chacun d'entre un peut être éliminé sans aucune problème par l'exploitation d'un bug (perché en haut d'une porte pour bloquer votre ennemi qui ne sait plus que faire, un bon timing d'attaque au corps à corps pour éliminer en un coup votre adversaire). Les boss constituent le véritable point faible du jeu, complètement ratés qu'ils sont. Pour le reste du jeu, malgré les quelques approximations, l'IA à la ramasse, la répétitivité et la facilité (même en mode Deus Ex), le système de jeu ouvert en terme d'approches pourra satisfaire les joueurs qui accepteraient de passer outre ces défauts, défauts qui pourront néanmoins être rédhibitoires pour les plus exigeants d'entre vous.



Lorsqu'une batterie est chargée en entier, vous pouvez réaliser des exécutions au corps à corps. Magistralement chorégraphiées, ces scènes présentent un défaut: le reste du jeu est figé en pause, ce qui donne lieu à des visions irréelles où un garde se figera pour vous laisser exécuter son pote.



L'habit ne fait pas le moine, l'occasion fait le larron


Sur le plan technique le jeu ne brille pas forcément. Si la réalisation graphique n'est pas ignoble, elle n'est pas au niveau des grosses productions actuelles. Certes, une certaine identité esthétique ressort de l'ensemble mais cela ne nous fera pas passer sur les visages figés des PNJ, la faible diversité des modèles (dont les développeurs se moquent eux-mêmes dans les derniers niveaux), une rag-doll des corps inanimés burlesques et des bugs, notamment au niveau du son qui disparait parfois sans raisons. Au début du jeu, on a accès à Detroit, sorte de hub ouvert qui nous permet de naviguer entre les missions. La carte n'est pas gigantesque mais fait illusion. Par la suite c'est dans les bas-quartiers d'Hengsha qu'on pourra déambuler. Si cette liberté nous permet d'accéder à des missions secondaires bien scénarisées et qui donnent crédibilité à l'ensemble, ne vous bercez pas d'illusions, Deus Ex n'est pas un jeu à monde ouvert. 75% du jeu se passe en effet dans des complexes à la progression très linéaire, même si des choix d'embranchements vous seront parfois proposés. La liberté de mouvement en prend un coup et le fait qu'on nous l'ait vendu comme un jeu en monde ouvert fait un peu grincer des dents. De plus, dans ces complexes, les couloirs semblent se ressembler tous et sont finalement génériques, loin des efforts pour créer une identité esthétique propre qu'on pourrait retrouver dans l'appartement d'Adam à Detroit ou dans les bas-quartiers d'Hengsha. C'est finalement un problème récurrents avec les jeux japonais. L'idée de départ est bonne mais il semble qu'à un moment, les développeurs soient pressés par le temps et jettent toutes leurs bonnes idées de côté pour s'orienter vers quelque chose de beaucoup classique et finalement bien décevant.



Le système de couverture à la gears of war rend le jeu beaucoup trop facile



Un bilan en demi-teinte


A la lecture de ce test vous pouvez peut-être avoir l'impression que Deus Ex est un jeu raté et bon à jeter. Mais le fait est, et c'est ce qui me fait mal au cœur, qu'il s'avère finalement un bon jeu, si tant est qu'on accepte de passer outre les bugs de collisions, les faiblesses techniques, l'IA approximative, la difficulté au rabais, la redondance des environnements fermés et le game design parfois en deçà de ce qu'on pourrait attendre d'un jeu PS3. L'aspect esthétique n'est pas à négliger, la customisation et le développement du personnage sont plutôt réussis et plaisants, la variété des approches et du gameplay sont jouissives, Adam a la classe et le voice acting est très correct. Beaucoup de latitude est également octroyée au joueur dans les choix de dialogue. Si l'histoire ne s'en retrouvera pas fondamentalement changée (à part le choix moral philosophique final), ces choix vous permettent d'incliner la progression de la mission dans un sens ou dans un autre. On aura même le droit à des scènes de débat dans lesquelles il s'agira de convaincre son interlocuteur en choisissant à chaque réplique de le brusquer, de le conforter ou de recentrer la conversation. Une feature qui peut sembler anecdotique mais qui apporte un peu de réflexion et de vent frais dans une industrie où convaincre signifie en général spammer des boutons pour aligner des jauges. Ici il faudra peser le pour et le contre dans les choix de dialogue et force est de constater que cela marche plutôt bien. Mais le point fort de Deus ex n'est ni dans son gameplay ouvert ni dans sa réalisation à la ramasse mais bien dans son scénario développé et dans son écriture maitrisée. Si on n'évitera pas les poncifs et lieux communs, véritables écueils de ce type de narrations, le scénario est néanmoins frais et permet en plus de développer une certaine réflexion sur la technologie et le transhumanisme. Alors d'accord on pestera contre les approximations techniques du jeu, comme souvent dans les jeux japonais, mais cette histoire nous pousse à progresser, à améliorer Jensen pour qu'il se transforme en véritable outil de destruction ou en ombre, à se livrer aux mini-jeux de piratage (relativement peu intéressants comme d'habitude) et pourquoi pas à se rire un peu de l'intelligence artificielle en lui jouant des tours. Attention, j'ai beau dire que le jeu est facile, en mode Deus Ex, sans armure, les ennemis vous tuent en 2 coups. Il ne s'agit donc pas d'y aller à l'arrache.


daemonfire

  • JOUABILITÉ

    15

    Jensen est très maniable, le gameplay est aux petits oignons et les libertés offertes par le choix dans la dynamisation permettent une véritable diversité dans les approches. Néanmoins, ce bilan positif sera entâché par le manque de réactivité des ennemis, les combats contre les boss foirés et la trop grande facilité pour traverser le jeu, que ce soit en furtif ou, à fortiori, en bourrin.

  • GRAPHISMES

    12

    En deçà des grosses productions, Deus Ex s'inscrit dans la moyenne des jeux PS3 et l'identité esthétique développée dans les premiers environnements lui confère un certain cachet, même si cet aspect disparait par la suite pour laisser le champ libre aux environnements génériques et nus.

  • BANDE SON

    13

    Pas marquante mais pas foncièrement mauvaise, la bande son passe globalement inaperçue. Peu de musiques, des bruitages discrets. Les quelques bugs sonores ternissent le tableau mais le voice acting de qualité redresse un petit peu la barre.

  • DURÉE DE VIE

    13

    Il m'aura fallu une dizaine d'heures pour terminer ce jeu en difficulté Deus Ex. Plus que la majorité des jeux d'actions actuels mais pas encore suffisant pour lui offrir une meilleur note. La rejouabilité est limitée même si on pourra essayer une approche différente. Finalement l'intérêt réside surtout dans le scénario et une fois terminé, aucune raison d'y retourner. Pas de modes multijoueur pour rallonger artificiellement la durée de vie.

  • SCÉNARIO

    17

    Certainement le point fort du jeu et ce qui m'a poussé à le finir. Une écriture intéressante, une réflexion. Trop peu de jeux essaient d'aboutir sur un choix philosophique et si on n'est pas encore dans de la métaphysique Nietzchéenne, c'est plutôt agréable. Les dialogues sont travaillés jusque dans les missions secondaires et même si on n'échappera pas aux clichés, l'ensemble est très convaincant.

  • Points positifs

    • Un gameplay ouvert et diversifié
    • Une histoire et une ambiance réussies
    • Une difficulté plus ou moins adaptée à tous les publics
  • Points négatifs

    • Gunfights molles
    • Graphismes en deçà des standards actuels
    • Problèmes techniques
    • Level design et combats de boss foirés

Conclusion

Deus Ex n'est pas un mauvais jeu, c'est même un bon jeu, mais il n'est pas la moitié de ce qu'il aurait pu être. Un scénario prenant, une logique de gameplay ouverte séduisante, un certain sens de l'esthétisme où on voit ressurgir Blade Runner. Mais le tout est en partie gâché par la réalisation en demi-teinte, l'IA à la ramasse, les boss ratés, et la trop grande facilité du jeu. Un essai honorable mais pas un jeu culte. A essayer en occasion.

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Commentaires (3)

author Titiboy 15/07/2012
20:39
Ohhh very good d'avoir un test pour un jeu de ce qualibre !
Merci.
author const 22/08/2012
11:29
Il manque les + et les -
Après je le publie :)
author daemonfire 22/08/2012
23:29
Les +

-Un gameplay ouvert et diversifié
-Une histoire et une ambiance réussies
-Une difficulté plus ou moins adaptée à tous les publics

Les -
-Gunfights molles
-Graphismes en deçà des standards actuels
-Problèmes techniques
-Level design et combats de boss foirés