Sorti il y a plus de cinq ans sur la Playstation 2, Shadow of the Colossus avait suscité à l’époque énormément d’engouement auprès de la presse vidéo ludique ainsi que du coté des joueurs. Fumito Ueda, devenu une véritable figure emblématique du jeu-vidéo auprès des joueurs, avait déjà placé la barre très haut avec son premier jeu, Ico. Nous plongeant dans un univers poétique, coloré et onirique, on vivait déjà avec ce jeu l’expérience de toute une vie et on voyait se réaliser sous nos yeux l’avènement de l’imagination humaine. Mais s’il n’y avait que les joueurs pour le remercier, Fumito frappa encore une nouvelle fois en sortant avec toute son équipe son nouveau bijou du jeu-vidéo, Shadow of the Colossus. C’était en 2006. Il n’en fallait pas plus pour qu’un remake HD vienne sortir sur Playstation 3, apportant avec elle son lot de magie, de points corrigés et de joueurs satisfaits.
Wander, seul contre tous
Pour ne parler que de l’histoire en elle-même, elle se veut très simple et c’est bien pour cela qu’elle en devient très belle. Nous incarnons Wander, un jeune garçon qui amène sa dulcinée dans une contrée interdite afin de pouvoir la sauver des griffes de la mort où elle est enfermée depuis maintenant bien trop longtemps. Dans ce lieu aussi grand que somptueux, la mission de Wander sera de défier seize colosses afin que Dormin, l’esprit qui protège ces lieux, puisse redonner vie à la jeune demoiselle, nous paraissant à première vue comme une apparition avec son teint blême et ses habits blancs.
Nous pourrions voir cette histoire comme étant proche d’un Zelda, dans le fait qu’il faille sauver la personne que l’on aime. Mais dans Shadow of the Colossus, cette personne est déjà dans les cieux et on se voit alors très naïf mais aussi follement amoureux. Nous allons faire confiance à la voix d’un esprit pour espérer une quelconque aide de sa part. L’amour peut nous mener à faire les gestes les plus fous et Wander, lui, devra se confronter à seize colosses plus grands que des montagnes.
Des colosses gigantesques et une sensation de culpabilité
Nous voilà donc parti en route pour le premier colosse, armé de notre épée et de notre arc, en compagnie de notre fidèle monture Aggro pour seul renfort. Et à la vue du premier colosse, un frisson intense nous parcourra l’échine et l’on se résignera à tuer une bête aussi magistrale. Pourtant, il le faut, c’est la règle du jeu. Mais pourquoi sommes-nous si violents avec ces colosses que nous venons déranger pour notre propre intérêt? Voilà l’un des plus grands points forts de Shadow of the Colossus. Là où nous n’aurions aucun remords à liquider des centaines d’ennemis sur un Call of Duty, nous comprenons sur Shadow que ce combat est à sens unique et qu’il n’est peut-être pas légitime. Plus fort encore, nous ressentons une vraie tristesse lorsque l’on voit la bête s’effondrer sous le coup final porté par notre épée. On se sent coupable de l'avoir abattu et on se demande si c'était vraiment nécessaire. Quand on arrive à ressentir ce genre d’émotions dans un jeux-vidéo, c’est que nous sommes devant un oeuvre maitrisée et respectant le joueur et le jeu.
Pouvant être de différents types, on croisera sur notre route des colosses qui fascineront et dont on aimerait pouvoir les approcher pacifiquement, admirer leur beauté et leur prouver tout notre enchantement, avant que la volonté première de les tuer reprenne le dessus. Des colosses volants aux colosses sous marins, il y en a vraiment pour tous les gouts.
Dans Shadow of the Colossus, chaque colosse est une histoire à part entière vécue par le joueur ; comme une partie de ce monde gigantesque qui se lèverait de tout son long devant nous, à attendre le clou du spectacle. Cette immensité confère une véritable identité à ce jeu et l’on en vient très vite à vivre cette aventure dans la peau de Wander. Celui-ci, avec sa toute petite épée qui ressemblerait à un couteau Suisse pour tous ces colosses, n’a que son courage et sa soif d’amour face à ces monstres. C’est pour cela qu’on en viendra parfois à pester contre sa faible durée d’endurance ou encore sa propension à tomber dès que ça remue un peu. Même si ces deux derniers points agacent, il faut bien reconnaître la volonté des développeurs d’avoir voulu coller à la réalité. Wander n’est pas un super héros, c’est un homme comme vous et moi, sans pouvoir ni armes à feu. Et c’est d’autant plus gratifiant de réussir à battre un colosse de la taille d’une montagne.
Peinture vivante
Ce jeu est une véritable peinture et l’on prendra un réel plaisir à se balader à travers ce monde immense, à ne rien faire, juste admirer la beauté du paysage et les quelques colombes s’envolant ça et là. Car au delà de sa partie combat, Shadow of the Colossus est un jeu contemplatif où le joueur est laissé libre de ses mouvements. Preuve s’il en est, de nombreuses zones "inutiles" se trouvent sur la map, où l’on pourra par exemple s’accrocher aux poissons ou encore aux ailes des aigles pour les accompagner dans leur vol. Magique, le mot est là, et Fumito Ueda nous démontre une fois de plus qu’il n’y a pas forcément besoin d’une très grande technologie (bump, 3D etc) pour qu’un jeu devienne une oeuvre d’art. Il y a aussi quelques petits à coté sympathiques, comme le fait de ramasser la queue des lézards pour nous faire augmenter notre jauge d'endurance ou encore manger des fruits pour voir accroître notre vie générale. Cette recherche nous permettra notamment de découvrir des endroits encore inexplorés mais qui n’attendaient que nous.
Un titre terriblement addictif
Concernant la durée de vie du titre, la première partie du joueur sera évidemment la plus longue. Pour l'exploration de la carte et la découverte des différents colosses, il vous faudra bien une dizaine d'heures de jeu pour boucler la partie. Une durée de vie correcte donc et qui se voit décuplée par un mode contre-la-montre qui vous demandera des réflexes et de l'agilité pour tuer les colosses dans un temps imparti.
Vous aurez également la possibilité de grimper jusqu’à un jardin secret où vous pourrez admirer la tranquillité du lieu et aussi mangez des fruits vous feront baisser la vie. On comprend très vite une fois en haut qu’il ne faut pas se laisser tenter comme Adam s’était laissé aller à manger la pomme, nous ne pourrions pas redescendre de ce lieu et serions contraint à la mort, pétrifié devant tant d’efforts inutiles. Ce jardin se situe au dessus de la pièce principale et pour pouvoir y accéder, il faut avoir l’endurance nécessaire. Quatre partie entières seront obligatoires, ça vous donne une idée de la durée de vie. Mais l’accession à ce jardin n’est pas la seule raison pour laquelle vous allez recommencer encore et encore. Ce jeu est addictif et on tombe véritablement amoureux de ces colosses, on tente d’autres techniques d’approches, on joue, on souffre devant les cris de la bête égorgée et on se repose devant un lac aperçu durant une petite balade. On apprécie l’instant, tout simplement.
Une bande son parfaite
Les thèmes sont vraiment magnifiques, les différents instruments utilisés sont en parfaite corrélation avec l'esprit du jeu et les musiques accompagnent parfaitement le joueur, à chaque instant. Que l’on soit en train de se balader ou en train de combattre un colosse, chaque musique est bien pensée pour que l’on soit immergé. Un grand bravo à Kow Otani qui réalise ici l'une des plus belles bandes originales d'un jeu-vidéo.
Quelques défauts que l’on pardonne très rapidement
Dans la vie, rien n’est parfait et tout le monde le sait. Et si Shadow of the Colossus est un très grand jeu, il n’en demeure pas moins vrai qu’il souffre tout de même de quelques petites maladresses.
-Le popping incessant. Même si ce remake HD efface beaucoup de défauts, le popping est toujours là et on aurait aimé ne plus voir ce genre de choses sur une console de cette génération. Ceci dit, ça n'altère en rien le plaisir de jeu.
-Des temps inégaux pour le contre-la-montre difficile. Pour le coup, les développeurs se sont plantés largement dans les temps de certains colosses. Quand le dernier nécessite entre et six et neuf minutes alors que nous avons treize minutes d’accordées, le troisième colosse qui représente la plus grande difficulté du titre nous oblige à le tuer en cinq minutes. C’est frustrant, démotivant et l’on en vient parfois à abandonner pour cette raison.
-Une impression de vide. Si certains joueurs pourront trouver le monde du jeu magique et envoûtant avec l'envie de découvrir tous les moindres recoins de la carte, d'autres joueurs quant à eux trouveront le jeu vite ennuyeux et creux. Hormis tuer les colosses, il est vrai que Shadow of the Colossus n'offre rien d'autre que d'admirer la beauté des paysages et de ramasser des fruits.
-La réalisation technique du titre laisse à désirer même si ce portage HD enlève bon nombres de défauts du jeu original.
Un jeu mythique
Shadow of the Colossus fait parti de ces oeuvres intemporels dont on reparlera encore dans des décennies, où l’on se souviendra combien il était dur de ne pas verser la larme devant ce qui sera l’une des plus belles fin du jeux-vidéo et combien ces nombreux colosses nous auront fait souffrir. Finalement, au bout du chemin se trouve toujours la lumière. Et après avoir terrassé tous ces géants, notre seul souhait serait que rien ne s’arrête. On en viendrait presque à comprendre tout le combat mené par Wander, priant les forces obscures pour sauver sa déesse.
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