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Triangle Strategy

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Après une première sortie en 2022, Triangle Strategy sautait le pas le 20 août dernier pour arriver sur la dernière génération de consoles, sortant simultanément sur PS5 et Xbox Series. On y trouve notamment Tomoya Asano aux commandes, officiant depuis quelques années sur les plus petites productions de Square Enix, telles que Bravely Default et Octopath Traveler. Développé par Square Enix et Artdink, le titre est initialement édité par Nintendo pour la version Switch, puis par Square Enix pour les autres versions. Ce tactical-RPG a donc fait un bon bout de chemin, et il est temps pour ConsoleFun de se pencher dessus : à l’heure où FF Tactics a enfin refait surface, Triangle Strategy mérite-t-il votre intérêt ?

 

 

Un continent, trois territoires, et vous

 

L’histoire de Triangle Strategy prend place sur le continent de Norzélia, divisé en trois territoires : le royaume royaliste de Glenbrook, le duché libertarien d’Aesfrost, et les terres sacrées d’Hyzante, une théocratie. On y incarne Serenor Wolffort, futur maître de la maison Wolffort, l’une des trois grandes maisons du royaume de Glenbrook, reconnue pour ses talents militaires. Aesfrost règne en maître sur la majorité de l’exploitation de mines de fer, tandis qu’Hyzante dispose de l’unique source de sel du continent, une denrée nécessaire au peuple et donc plus que convoitée par chaque instance de pouvoir. Cette accaparation des ressources a mené à une guerre trente ans plus tôt, dont le royaume de Glenbrook a permis la fin en confiant la gestion des tractations du sel à la Firme Norzélienne, une institution de marchands politiquement neutre.

 

Le chaos arrive soudainement, alors que l’on se prépare à un mariage politique, et qu’un accord s’était conclu entre les trois territoires autour de l’exploitation d’une mine de fer. Le scénario de Triangle Strategy est un immense jeu géopolitique, à la façon d’un Game of Thrones, où les choix narratifs vont influer sur le déroulé de l’histoire et sur l’avenir du continent.

 

Car Triangle Strategy, en tout bon tactical-RPG qu’il est, lorgne largement du côté des visual novel. Les batailles ne prennent place qu’après de longues avancées scénaristiques, lorsqu’elles sont nécessaires. Hormis le premier combat qui fait office de tutoriel, aucune bataille ne semble futile ou inintéressante, d’autant qu’elles sont parsemées de courtes prises de paroles entre les personnages principaux au fil de l’avancée des affrontements.


Le continent de Norzélia va être la scène d’un conflit entre trois grandes puissances.

 

 

Chef de guerre sur le champ de bataille, figure politique partout ailleurs

 

Mais si la majorité de votre temps de jeu pourra passer dans la lecture de l’histoire, il faut noter qu’elle est parsemée d’éléments vidéoludiques. En effet, certaines phases dites d’investigation permettent de se balader dans les environnements et parler à différents personnages, l’occasion parfois de récolter des informations. Car certaines situations nécessiteront l’avis et le vote des six personnages principaux, en plus de Serenor –qui pourra trancher en cas d’égalité. Se détermineront ainsi des alliances stratégiques avec les autres territoires, des allégeances et/ou trahisons, et l’expression de nos intimes convictions !

 

Les informations récoltées servent alors à tenter de convaincre les autres personnages de suivre le même avis que nous : ils ont la plupart du temps un avis sur le cap à prendre, mais peuvent être convaincus si vous avez les bons arguments.

 

Ce système de décisions est articulé en une mécanique de valeurs. Vos choix narratifs représentent vos valeurs, divisées en trois catégories : Éthique, Pragmatisme et Liberté. Chaque choix ou interaction avec un PNJ allant dans une de ces directions fera augmenter la valeur de la conviction associée, ce qui vous permettra peu à peu de plus facilement convaincre vos interlocuteurs de suivre telle ou telle voie.


Lors de choix cruciaux pour votre futur, il faudra user de vos informations pour tenter de faire vaciller vos alliés dont l’avis diverge.

 

Cette mécanique permet d’avoir d’incarner un véritable stratège et une figure politique aux multiples responsabilités, bien au-delà du « simple » chef de guerre avec la gestion des unités lors des batailles. Elle permet d’avoir un déroulé scénaristique propre à vos décisions, impliquant que vous ne pourrez pas tout voir du jeu en une seule partie, avec une plusieurs fins (bien que celles-ci ne soient liées qu’au choix final pour la plupart). Par ailleurs, certaines informations permettant de convaincre vos alliés ne sont disponibles que dans des scènes liées à d’autres « routes », ce qui vous empêche d’avoir les pleins pouvoirs dès votre première partie. Dès votre premier New Game+, le titre affichera alors la correspondance entre un choix et la valeur à laquelle il correspond, ce qui pourra faciliter vos choix.

 

 

Dissonnances ludo-narratives et déroulé scénaristique

 

Il est d’autant plus notable que l’écriture est de haute volée, et que les différents embranchements de chaque décision raccordent parfaitement au déroulé suivant, peu importe l’imbrication. Le seul bémol vient d’une première dissonnance ludo-narrative lors du déroulé scénaristique : l’un des enjeux majeurs du jeu est implicite et connu seulement des antagonistes pendant une bonne dizaine de chapitres. Cependant, d’un point de vue du joueur et grâce à notre connaissance du monde, cet enjeu est évident dès le moment où tout tourne mal dans le jeu.

 

De plus, si Triangle Strategy lorgne du côté du visual novel, il lui manque une mécanique bien connue du genre : la flowchart. Bien que possédant une frise chronologique résumant les différents embranchements du scénario, il est ici impossible de choisir un point dans ce déroulé à recharger pour faire un choix différent et en voir les implications. Il sera alors obligatoire, pour tout complétionniste, de faire quatre parties différentes pour voir tout ce que le jeu a à proposer.


La frise chronologique ne reprend malheureusement pas les fonctionnalités de la flowchart propre au visual novel : il vous faudra recommencer une partie pour voir les autres chemins possibles.

 

Cela a pour avantage d’offrir une grosse rejouabilité au titre, d’autant que plusieurs personnages ne sont recrutables que dans des embranchements précis (et le jeu a le bon goût de nous laisser l’ensemble des personnages recrutés au fil des New Game+), de la même façon que d’autres personnages sont liés aux valeurs de vos différentes convictions.

 

Or, cette rejouabilité cristallise une deuxième dissonnance ludo-narrative, notamment autour de la vraie fin. En effet, et de la même façon que Fire Emblem Fates Revelation en 2016, cette vraie fin rend les autres assez peu crédibles, bien qu’intéressantes. Les trois fins « principales » reposent sur un compromis qui peut être dépassé, en respectant un nombre de conditions tout au long du jeu. La Golden Ending, elle, apporte une conclusion satisfaisante à tous les niveaux, en plus de débloquer un chapitre additionnel servant d’épilogue très appréciable.


Le système de combat est assez basique pour du tactical-RPG, mais fonctionne à merveille.

 

 

Simplifier le gameplay, renforcer l’immersion

 

 

N’oublions pas bien sûr de parler de ce qui fait de Triangle Strategy un tactical-RPG : les combats au tour par tour. Sur cet aspect, le jeu va à l’essentiel : chaque personnages a des compétences qui lui sont propres, peut améliorer son arme deux fois, et accéder ainsi à de meilleures améliorations de stats, toutes prédéfinies et moyennant monnaie et ressources.

 

Il n’est donc pas question de se demander si l’on va opter pour telle ou telle classe pour chaque personnage, ni passer des heures à optimiser les relations entre eux comme c’est devenue monnaie courante avec les social-RPG façon Persona et Fire Emblem récents. Chaque personnage dispose tout de même de deux scènes leur apportant un peu de background, et le casting est tout à fait attachant.


Le système d’améliorations va à l’essentiel : trois rangs d’armes avec chacun leurs ajouts de stats ou compétences, et deux rangs de classe par personnage.

 

Les batailles apportent leur lot de twists au fil du jeu, avec des conditions de victoire spécifiques, différents terrains pour laisser cours à des stratégies inventives, et profiter de chaque atout à sa disposition pour prendre l’avantage sur les ennemis. Attaques en tenaille, utilisation de compétences nécessitant des Points Tactiques obtenus à raison d’un par tour, atouts déblocables au campement, orientation du personnage pour éviter les coups critiques dans le dos : les options sont nombreuses et intuitives.

 

Les morts ne sont d’ailleurs pas permanentes, ce qui laisse place à l’erreur et rend l’expérience plus appréciable, étant donné que le challenge peut être relativement élevé si l’on joue trop offensif.

 

 

Une direction artistique soignée et marquante

 

 

Triangle Strategy est un titre arborant la fameuse HD-2D de Square Enix, terme marketing un peu pompeux pour désigner du pixel-art soigné avec des sprites en haute définition, et une esthétique jouant sur les effets de lumière et de particules.

 

Si l’appréciation de cette esthétique est propre à chacun, on a ici affaire à la meilleure qualité d’HD-2D vu chez l’éditeur. Il faut néanmoins relever un parti pris consistant à proposer un effet de flou par défaut, avec une bulle de netteté autour du héros, qui est particulièrement désagréable. Heureusement, cela peut se désactiver. Le pixel art est de très bonne facture, mais s’accompagne de quelques textures un peu baveuses. Les personnages disposent de portraits observables via une touche lors des dialogues, mais qui n’apparaît pas à côté des prises de paroles, ce qui est dommage étant donné les somptueux artworks.


Les artworks des personnages sont sublimes, mais on peut passer une partie entière sans les voir…

 

Les attaques signatures de chaque personnage disposent d’animations spéciales, le reste étant malheureusement très sobre. Il n’y a d’ailleurs aucune mise en scène lors des attaques sur le champ de bataille : pour ça, on est très loin de ce que peut proposer une licence telle que Fire Emblem à côté. Le jeu mise énormément sur la notion d’espace représentatif, nous laissant imaginer la véritable grandeur des endroits qu’il ne nous montre que succinctement. Cela imprègne même la narration où, comme en conseil de guerre, on voit des pièces représentant les forces alliées ou ennemies se déplacer, et même changer de couleur en cas d’alliance ou trahison. Un parti pris qui permet de minimiser les modélisations, mais qui participe à ce sentiment de sobriété.

 

La musique, par contre, est une usine à délice pour les oreilles. Les thèmes sont marquants, agréables tout au fil des nombreuses heures de jeu malgré leur répétition, et collent parfaitement aux différentes situations, épiques, tristes ou calmes. Le titre est par ailleurs intégralement doublé, avec d’excellentes voix anglaises. Le texte anglais se permet, comme souvent pour les J-RPGs, quelques libertés par rapport au texte français affiché : les traductions françaises depuis le japonais sont généralement plus proches du texte original, même si nous ne l’avons pas vérifié ici. Certaines répliques sonnent tout de même diablement bien dans la langue de Shakespeare.


Avant le début d’une bataille, on a accès aux conditions de victoire, de défaite, et l’on peut se préparer en conséquence.

  • JOUABILITÉ

    15

    En allant au plus simple dans la progression de ses personnages, Triangle Strategy se veut efficace et plus rythmé, d’autant que le titre ne néglige pas sur la quantité et la longueur des passages narratifs.

  • GRAPHISMES

    14

    Faisant partie du haut du panier de la HD-2D de Square Enix, le titre manque tout de même d’animations, de mise en scène, et arbore quelques textures baveuses. L’effet de flou par défaut est heureusement désactivable, mais le tout dispose d’un potentiel qui n’est pas exploité à sa juste mesure lorsque l’on compare à ce qui se fait à côté en tactical-RPG, en témoignent les artworks de personnages, si peu utilisés.

  • BANDE SON

    18

    Avec des thèmes marquants, agréables tout au fil des nombreuses heures de jeu malgré leur répétition, et collant parfaitement aux différentes situations qu’elles soient épiques, tristes ou calmes, la bande son de Triangle Strategy est excellente. Le doublage est lui aussi de très bonne facture.

  • DURÉE DE VIE

    16

    Si une première partie dure entre 25 et 30 heures, Triangle Strategy ne saurait être complété sans avoir goûté à la Golden Ending, ce qui est déconseillé pour une première run. Les complétionnistes, eux, en ont pour une centaine d’heures de jeu, et un minimum de quatre parties s’ils veulent tout voir.

  • SCÉNARIO

    16

    Avec des embranchements scénaristiques intéressants et impactants, Triangle Strategy n’échappe pas à la dissonance ludo-narrative, qu’il s’agisse de la révélation de son enjeu majeur, ou des implications de sa vraie fin au détriment de la pertinence de la présence des autres. En reste un déroulé toujours crédible, une impeccable imbrication des différentes routes, et un jeu géopolitique extrêmement cohérent et intéressant.

  • Points positifs

    • La richesse de l’écriture et l’intelligente imbrication des différents chapitres liés aux choix narratifs
    • La bande son, avec une usines à bangers pour les musiques, et un excellent doublage anglais.
    • Le casting de personnages, tous très attachants.
  • Points négatifs

    • Le manque de mise en scène et d’animations
    • L’absence de flowchart obligeant à faire au moins quatre parties pour tout voir
    • Quelques dissonances ludo-narratives avec un enjeu majeur et l’importance de la Golden Ending.

Conclusion

Nouveau-venu dans la cour des tactical-RPGs, Triangle Strategy apporte de quoi agrémenter la formule en lorgnant du côté des visual novel, s’inspirant parfois trop du genre (la quantité de texte), parfois pas assez (l’absence de flowchart). Il demeure une proposition extrêmement complète, avec un gameplay misant sur des mécaniques simples plutôt que complexes, permettant d’aller à l’essentiel. Les phases d’investigation et de vote viennent ludiquement enrichir l’expérience, et tout ici sert la narration avant tout. Seuls le manque d’animations et de mise en scène viennent botter en touche, alors même que la HD-2D de Square Enix n’a jamais été aussi appréciable, accompagné d’une bande son impeccable et marquante. On ne saurait que vous recommander Triangle Strategy, tout en vous intimant de faire au moins deux routes, la première selon votre instinct, la deuxième avec un guide pour voir la Golden Ending, plus satisfaisante et pertinente que les autres.

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