Depuis des années maintenant, nous imaginons facilement les tourtereaux qui se tournent autour, une boîte de chocolats à la main, prêts à partager leurs sentiments les plus purs avec l'élu de leur cœur le jour de la Saint-Valentin. Mais qui pensait voir débarquer Wanted : Dead dans les rayons, un jeu d'action décalé et violent, durant la fête des amoureux ? Peu de gens, très certainement. Mais Tomonobu Itagaki, créateur de la série Dead or Alive et des deux premiers épisodes 3D de la franchise Ninja Gaiden, a décidé à sa façon d'exposer au monde entier son amour pour le jeu vidéo, et plus précisément celui d'une ère de plus en plus lointaine : celle de la sixième génération de consoles (PlayStation 2, Xbox, GameCube, Dreamcast) qu'il n'est pas le seul à regretter. Ainsi, en développant Wanted : Dead avec l'aide des membres de son studio Soleil et le soutien de 110 Industries, Itagaki écrit une lettre d'amour à une époque où de nombreux concepts jaillissaient de sa tête — des idées qui ne verront jamais le jour comme Dead or Alive : Code Chronos et Project Progressive. Toutefois, même si les attentions sont bonnes et sincères, quid de la nostalgie qui a servie de moteur à la réalisation de ce jeu se voulant rétro ? A-t-elle été bonne conseillère ou ne nous apporte-t-elle qu'une désastreuse œuvre d'auteur sans entrain ni saveur ?
Une entrée en la matière fracassante !
Vouée à moisir en prison pour le restant de ses jours, Hannah Stone est invitée à rejoindre les rangs de la police hongkongaise dans le cadre d'une miraculeuse mais étrange procédure de réhabilitation. Après une ellipse temporelle, on comprend que la nouvelle inspectrice est à la tête d'un commando spécialement composé d'ex-détenus destiné à résoudre des affaires dangereuses : l'équipe Zombie. Les alliés d'Hannah sont présentés simplement et leur caractère correctement patent grâce à une mise en scène sobre et à un rythme narratif calme, mais la lenteur appréciable de la réalisation n'empêche pas Wanted : Dead de plonger hâtivement le joueur dans sa première mission tout de suite après cette bonne introduction.
Ainsi, on découvre rapidement les bases et les mécaniques de jeu, sommaires mais exigeantes, en affrontant des adversaires armés jusqu'aux dents. Dès le départ, un dilemme s'impose : se battre à distance en épuisant les munitions limités de son fusil d'assaut et de son arme secondaire, ou dégainer son katana pour déstabiliser plus facilement ses opposants, quitte à essuyer quelques tirs ennemis dans sa course. Une paire de coups suffisant à faire tomber l'agent Stone, il faut jongler en permanence entre prudence et témérité, par exemple en se mettant à l'abri derrière des obstacles, puis en se précipitant sur les ennemis dont l'intelligence artificielle déplorable (programmée pour tirer à vue) réagit brutalement pour nous éloigner d'eux ou nous mettre dans leur ligne de mire. Néanmoins, il est tout à fait possible de contrer leurs méchantes fourberies en utilisant le pistolet tactique : le joueur n'a pas à presser la gâchette de visée, seulement à enfoncer le bouton dédié à l'arme et à orienter le stick analogique gauche dans la direction de sa cible pour lui tirer dessus.
Utiliser un injecteur de soin pour se revigorer active une animation où Hannah est vulnérable durant quelques précieuses secondes, ce qui peut lui être fatal. Si elle n'a pas eu le temps de se soigner et tombe au combat, elle peut compter sur Doc pour la remettre sur pieds. Cependant, elle ne peut être relevée qu'une seule et unique fois entre chaque checkpoint.
Occasionnant peu de dégâts, cette attaque est réactive et permet d'immobiliser plus ou moins longtemps son adversaire selon le moment où l'on appuie sur la détente. Si le joueur tire alors qu'il est censé recevoir un coup imblocable (indiqué par un indice sonore et un flash orange), l'ennemi a plus de chance d'être étourdi, une opportunité à saisir immédiatement afin de l'achever avec un finisher move joliment chorégraphié et jouissif qui, en prime, régénère une partie de la santé d'Hannah.
Il est également bon de noter la présence d'une jauge d'adrénaline qui, une fois remplie, permet de tirer une rafale de balles avec son pistolet sur un ou plusieurs assaillants pour les mettre en état de choc. On peut alors les achever un à un dans un ballet sanglant spectaculaire et gratifiant car, en effet, les affrontements sont intenses au point que le temps semble parfois se dilater : c'est long et difficile, mais parvenir à éliminer un opposant est toujours une grande victoire. Les ennemis sont extrêmement robustes en plus d'être puissants et agressifs, brisant la garde du joueur en une seule frappe. C'est pourquoi il est important de comprendre le b.a.-ba de la défense : parer au moment de l'impact et riposter en un éclair une fois l'assaut terminé est le meilleur moyen de l'emporter. Que ce soit avec la garde ou avec le pistolet, la défense est toujours une question de rythme — c'est une signature d'Itagaki en quelque sorte.
Chaque kill rapporte des points d'expériences pouvant être dépensés dans un arbre de talents. Les nouvelles capacités acquises sont généralement très utiles en plus de ne jamais altérer l'exigence du titre.
On peut toutefois reprocher la très pauvre variété des enchaînements katana-pistolet, même une fois l'arbre de compétences complété à 100% ce qui, par ailleurs, peut être fait avant le dernier chapitre du jeu, nous laissant donc avec des points d'expériences totalement obsolètes. Autre point noir au tableau : il est impossible de changer de caméra d'épaule en visant avec le fusil de Stone ou une arme secondaire (récupérée sur le sol), ce qui empêche le joueur de viser correctement lorsqu'il se trouve derrière un obstacle. Enfin, la boucle de gameplay est comprise dès le premier niveau ; les quatre suivants ne proposent pas de réelles surprises et on se cantonne toujours à avancer et à détruire des cibles qui se ressemblent toutes.
À chaque checkpoint, on débloque de nouveaux accessoires pour personnaliser son fusil d'assaut et son pistolet. Bien que les changements soient assez subtils, modifier les caractéristiques de ses armes à feu (portée, recul, dégâts, etc.) est parfois nécessaire pour faciliter son avancée.
Une routine vide de sens
Entre chaque mission, l'équipe Zombie rentre au commissariat, et si les cinématiques laissent présager que l'on va vivre le quotidien de ses membres, il n'en est malheureusement rien. Le joueur peut visiter le bâtiment pour ramasser des rapports expliquant brièvement le lore du jeu (et rapportant quelques points d'expérience), ou bien pour parler à des policiers et à des civils qui n'ont visiblement rien d'intéressant à dire, ou encore lancer des mini-jeux que l'on débloque au fur et à mesure de notre progression.
À l'instar des autres activités présentes dans le commissariat, jouer aux mini-jeux n'a pas grand intérêt, excepté pour faire des scores et battre des records personnels (à part la machine attrape-jouet qui récompense le joueur avec des figurines virtuelles inutiles et des vinyles que l'on ne peut écouter que dans le menu). En plus de ça, la majorité d'entre eux sont mal introduits à cause d'un agencement maladroit des cinématiques : la plupart d'entre elles arrivent sans transition, ni contexte.
Sur les consoles modernes, Wanted : Dead tourne correctement, mais sur Xbox One et PlayStation 4, c'est une toute autre affaire : le jeu ralentit sévèrement et les sons (dialogues, musiques et bruitages) buguent de concert, principalement lors des cinématiques en temps réel et lors des phases au commissariat, rendant celles-ci encore plus ennuyantes...
Obligatoires de surcroit, les phases au quartier général n'apportent pas plus de cohérence à l'univers du jeu ou à la routine des protagonistes. L'idée est sympathique mais mal exécutée, en plus de nuire au rythme de l'histoire qui, déjà, a tendance à s'essoufler en empruntant des facilités scénaristiques et en servant au joueur toujours plus de cinématiques déconnectées les unes des autres. Ça ne signifie pas pour autant que le scénario de Wanted : Dead est fondamentalement mauvais, car au-delà de sa simplicité et de sa présentation médiocre, il y a des personnages humains (quoique clichés), tantôt aimables, tantôt détestables, ainsi que des thématiques fortes et propres à Tomonobu Itagaki (notamment sur la famille et l'héritage) qui sont tristement éclipsées par le rythme bâtard de la narration.
Giclées de sang qui éclaboussent les personnages, démembrements... Les affrontements sont particulièrement violents !
Et bien que l'on puisse dire que l'histoire d'un beat them up comme celui-ci passe au dernier plan, le fait que les passages au commissariat (techniquement plus scénarisés que les phases d'action) soient obligatoires nous laissent penser que la narration décousue contribue à l'expérience de Wanted : Dead. De plus, le potentiel scénaristique semble totalement inexploité tant la communication commerciale mettait en avant des éléments qui sont finalement vite expédiés (comme le personnage de Cinnamon qui a le droit à son propre clip vidéo sur YouTube mais pas dans le jeu). Bien sûr, la rédaction de ConsoleFun évoque la communication commerciale du jeu pour une bonne raison : la nature même de Wanted : Dead — celle d'une lettre d'amour à la sixième génération de consoles — n'est jamais mentionnée dans le jeu, ce qui peut être déroutant pour un joueur ne s'étant pas préalablement renseigné sur le titre de 110 Industries et de Soleil.
En effet, pour ce joueur innocent, se promener dans des espaces vides et couverts de textures parfois ternes et grossières, remarquer des personnages clonés et mal animés, et voir des artéfacts de compression durant les cinématiques en pré-calculé n'est pas nécessairement un hommage à la Xbox ou à la PlayStation 2. Cependant, un connaisseur comprendra directement que presque chaque petit défaut à l'image est en réalité volontaire. Un choix artistique aussi déroutant que fascinant, presque insensé... Mais qui sommes-nous pour juger l'amour ?
Les cinq épisodes de Vivienne's Late Night Show, une parodie d'émission de cuisine présentée par Vivienne, un personnage du jeu interprété par Stefanie Joosten, peuvent être déverrouillés sous certaines conditions. C'est amusant, mais une fois encore, l'intégralité de cette série est disponible sur internet depuis plusieurs semaines...
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